Procès contre le militant BDS J.L Moragues : La complicité avec le génocide au coeur des débats

Montpellier, jeudi 22 mai 2025 devant le tribunal judiciaire, à la sortie du procès .
Face au génocide incontestable, le tabou des sanctions contre Israël vole en éclat.
Trois fois les parties civiles ont reporté le procès espérant sans doute que les réactions suscitées par le génocide se seraient calmées et qu’ainsi l’accusation de complicité avec Israël et son génocide aurait perdu de son acuité. Dans l’aveuglement de leur soutien à Israël, les parties civiles ont évidemment surestimé la capacité de l’État colonial israélien à soumettre l’héroïque peuple palestinien et les gazaouis en particulier, enracinés à leur terre aussi profondément que leurs oliviers.
Le déchaînement de barbarie sans limite de ces derniers jours a fini par obliger les dirigeants européens et leurs médias à se démarquer de la violence meurtrière ouvertement revendiquée par Israël. Désormais la qualification de génocide ne peut être publiquement niée que par les complices patentés du génocide. Désormais on est passé de l’exigence des sanctions économiques concrètes pour stopper le bras meurtrier de l’armée israélienne aux modalités d’application de ces sanctions. Même si l’on sait que tous les systèmes de freinage vont fonctionner être activés, un tabou est tombé, un cap est franchi. L’Union Européenne étudie les conditions de la suspension des accords d’association avec Israël. Ces accords qui font d’Israël l’équivalent d’un État européen lui accordent des privilèges douaniers exceptionnellement avantageux. L’UE est le principal partenaire économique d’Israël. Ces accords mentionnent dans leur article 2 qu’il sont conditionnés par le respect des droits humains par Israël. Depuis plus de 20 ans le mouvement de solidarité mène campagne au nom du respect des droits humains pour la suspension de ces accords.
C’est dire combien on est loin des conditions de calme plat espérées par les personnalités politiques du PS qui ont porté plainte : C. Delga Pdte Région Occitanie, K. Mesquida Pdt Département Hérault et H. Bourgi Sénateur de l’Hérault. C’est dire combien la force des Palestinien.ne.s, meurtri.e.s et affamé.e.s qui restent dignement debout, dressé.e.s sur leur ruines, parvient jusqu’ici, renforce et légitime nos positions, soutient nos arguments jusque dans ce procès.
La criminalisation de la solidarité à la Palestine sera t-elle impactée par ces prises de conscience ?
Au mépris des bouleversements qui s’opèrent dans quelques pays européens aujourd’hui (mentionnés ci-dessus) le monde de la justice semblait ce 22 mai 2025 celui d’une autre planète. Il faut savoir que les plaintes « simples » déposées par les personnalités PS contre J.L Moragues pour diffamation, relèvent « du droit de la presse » et qu’en cette qualité elles sont généralement ignorées des procureurs qui ne donnent pas suite. Or dans le cas précis, le procureur s’est empressé de donner suite (en avril 2024). Ce qui signifie que le gouvernement – dont le procureur applique la politique – a donné des consignes de répression concernant le mouvement de solidarité.
La criminalisation et la répression du mouvement de solidarité à la Palestine va bon train. Le gouvernement largement inspiré par le narratif israélien du 7/10/2023, après la dissolution effective de « Palestine vaincra » et les tentatives ratées de dissolution de « Action Palestine » et « Les Soulèvements de la Terre », le ministre Retailleau a annoncé sa décision de dissoudre « Urgence Palestine ». Le gouvernement, en phase avec le narratif israélien du 7/10, qui criminalise la solidarité à la Palestine et dicte la politique française à son ministre de l’intérieur. Le ministère public applique cette politique dans la justice.
Le ministère public et les avocats de la partie civile contre BDS et la Palestine
Les avocats des parties civiles ont joué sur deux tableaux. Le point de départ commun a été de nier d’un revers de main le génocide dans sa réalité concrète et monstrueuse à Gaza selon le schéma négationniste habituel : la qualification de génocide n’est pas « officielle ». Donc on ne peut pas en parler. C’est aussi simple que ça.
Mais paradoxalement le mot de génocide sera en permanence utilisé par les avocats en tant que terme abstrait, juridique qui va être agité et instrumentalisé à outrance en tant que crime suprême, crime contre l’humanité, pour tenter de rendre impossible la simple idée d’une possible complicité de ces personnalités avec un tel crime. L’unique argument étant l’absence de preuves tangibles de leur participation directe à ce génocide. Ils ont glissé de la complicité à la participation directe. Pour un un peu ils nous demandaient des photos de Bourgi dans un char israélien et faute de ce type de preuve tangible, eh bien le terme de complicité serait irrecevable.
La procureure n’a pas hésité à les suivre sur ce terrain même si elle a été contrainte de reconnaitre que les trois plaintes surajoutées par H. Bourgi imputant à J.L Moragues : des affiches collées rue de Barcelone à la Paillade, des cris « Israël assassin, Bourgi complice » place de la Comédie et l’affiche « je soutiens, inculpez-moi » , ne pouvait pas être retenues faute de preuves.
UN détournement complet du sens de l’affiche et une addition de mensonges

Affiche partagée par J.L. Moragues sur sa page FB qui est à l’origine des plaintes.
Bien qu’écourté dans son développement J.L Moragues a expliqué que les 7 chefs d’État du haut de l’affiche font commerce des armes avec Israël et à ce titre ils sont des complices directs du génocide. Que la direction BDS palestinienne a lancé une campagne d’embargo sur le commerce des armes avec Israël.

Marche de La Paillade à la Comédie à l’appel de BDSrance, Urgence Palestine le 17 mars 2025. Montpellier
Les 4 têtes du bas sont à mettre en rapport avec les textes du haut de l’affiche « Des sanctions contre Israël et ses complices » et l’appel à manifestation qui est une marche sur la Mairie de Montpellier en raison précisément des nombreux liens de la ville avec l’état d’apartheid aujourd’hui génocidaire. Il s’agit de leur complicité avec Israël, complicité ancienne, depuis 1977 initiée par G. Frêche avec la journée dite « de Jérusalem » organisée par le centre communautaire culturel juif de Montpellier, devenu centre culturel juif S. Veil et qui depuis 47 ans commémore la « réunification » de Jérusalem. C’est à dire l’annexion de Jérusalem et proclame Jérusalem capitale une et indivisible de l’État d’Israël.
La journée de Jérusalem :
https://www.instagram.com/reel/DJ6GYISMGug/?igsh=NGV2dDc0MHd4MHlk
La complicité des 4 PS qui figurent sur l’affiche tient à ce que le parti socialiste majoritaire dans les exécutifs de la Région, du Département et de la Ville sponsorise, est présent physiquement et soutient cette journée qui viole le droit international. Complicité dénoncée depuis 2010 avec force par BDS France Montpellier (et d’autres associations) qui demande en matière de sanctions la rupture des liens institutionnels avec Israël en particulier la rupture du jumelage avec la ville israélienne de Tibériade. Donc les 4 têtes présentes sont complices directes d’Israël et de sa politique de par leurs accords politiques, économiques et culturels avec Israël.

Carole Delga refuse de parler de génocide et demande l’interdiction des manifestations contre le génocide. N’est-ce pas de la complicité ?

Midi Libre. Juin 2024.Journée coloniale de Jérusalem, Parc de Grammont. de G à D : M. Bourgi , sénateur PS, Mme Mandroux ex maire PS de Montpellier, avec la carte le Maire de Tibériade, au Micro M. Delafosse PS. à D: Mme Bensoussan Pdte du centre culturel juif S. V. organisateur des journées coloniales.
Mais les milliers de manifestants du samedi à Montpellier et ceux de la manifestation du 20/04 annoncée viennent également exiger du maire PS de Montpellier, M. Delafosse qui lors de la journée coloniale de Jérusalem a déclaré « parler d’apartheid à propos d’Israël est mensonger », qu’il dénonce le génocide israélien à Gaza.
Ce qui est reproché aux 4 personnalités politiques figurant sur l’affiche c’est leur silence, leur absence de condamnation des massacres, du génocide. Il s’agit là d’une complicité indirecte avec le génocide, sans doute moins directement criminelle que celle des marchands d’armes à Israël. Les lettres en clair, étirées qui couvrent les personnages sont comme une ombre qui pèse sur eux . À l’intention des 4 locaux, elles sont une forme d’avertissement : attention vous êtes en train de vous engager dans une forme de complicité avec le génocide que vous pourriez regretter !
Il y a dix jours l’association Jurdi (Juristes pour le respect du droit international) annonce qu’elle met en demeure l’UE pour « manquement à son obligation de prévention du génocide à Gaza« . Elle menace de saisir la cour de justice pour faire constater « illégalité de l’inaction prolongée » des institutions face à la situation à Gaza. L’inaction, c’est à dire la non application des ordonnances de prévention du génocide est considéré par ces juristes comme une forme de complicité avec le génocide.
JURDI demande l’application de mesures fortes, comme ça a été le cas pour la Russie ou encore l’exclusion d’Israêl du système de paiement SWIFT, essentiel dans le système commercial mondial.
Quand BDS et la Coalition Montpellier contre l’apartheid et le génocide demandent à la ville de Montpellier, au Département et à la Région de suspendre tout lien institutionnel avec Israël afin de créer une pression pour obliger Israël à un cessez le feu et que pendant plus de deux ans ils refusent, comment peut-on affirmer que ce n’est pas une forme indirecte de soutien au génocide ?
Quand on multiplie la répression policière (interventions policières contre les stands « stop génocide »), quand on multiplie les PV et procès contre ceux qui combattent le génocide n’est-ce pas la forme la plus offensive de complicité ?