Un rapport historique de l’ONU soutient le boycott d’Israël

Print Friendly, PDF & Email

18 mars | Ali Abunimah

L’adhésion de ce rapport historique aux boycotts, aux sanctions économiques et autres initiatives populaires arrive à un moment où Israël essaie désespérément de criminaliser et de réprimer le soutien international aux droits des Palestiniens.

 

Publié par la Commission Economique et Sociale de l’Asie Occidentale [Proche et Moyen Orient] (ESCWA) de l’ONU, le rapport conclut que « Israël a édifié un régime d’apartheid qui asservit la population palestinienne tout entière ».

Il trouve « au-delà de tout doute raisonnable qu’Israël est coupable de politiques et de pratiques qui constituent les crimes d’apartheid » tels que définis par le droit international.

Il exhorte les gouvernements nationaux à « soutenir les activités de boycott, désinvestissement et sanctions et à répondre positivement aux appels à ce genre d’initiatives ».

Un régime racial

Le rapport de l’ONU – « Pratiques Israéliennes envers le Peuple Palestinien et la Question de l’Apartheid » – n’est pas une comparaison entre Israël et l’Afrique du Sud de l’apartheid, mais une évaluation des pratiques d’Israël contre la Convention Internationale sur la Répression et la Punition du Crime d’Apartheid de 1973 et contre d’autres lois essentielles sur les droits de l’Homme.

La convention définit le crime d’apartheid comme « des actes inhumains commis dans le but d’établir et de maintenir la domination d’un groupe racial de personnes sur n’importe quel autre groupe racial de personnes et de l’opprimer systématiquement ».

Le droit international définit la discrimination raciale comme « toute distinction, exclusion, restriction ou préférence fondée sur la race, la couleur, la descendance ou l’origine ethnique ou nationale », indique le rapport.

« La revendication » du mouvement sioniste « comme quoi la Palestine serait la patrie exclusive du peuple juif repose sur une conception expressément raciale des deux groupes », déclare le rapport. » Ceci veut dire que les Juifs et les Palestiniens sont des ‘groupes raciaux’ » dans le but d’appliquer la convention d’apartheid.

« La mission de préservation d’Israël en tant qu’Etat juif a poussé ou même obligé Israël à mener plusieurs politiques raciales générales », dit le rapport.

Elles comprennent « des politiques démographiques destinées à établir et à maintenir une écrasante majorité juive en Israël ».

Cela concerne le nettoyage ethnique de presque 800.000 Palestiniens en 1948, le déni du droit au retour pour les réfugiés palestiniens et « une série d’autres politiques destinées à restreindre la taille de la population palestinienne ».

Bien qu’ils puissent voter, les droits des citoyens palestiniens d’Israël -environ un cinquième des citoyens de cet Etat – sont également systématiquement restreints, tandis que seuls les Juifs bénéficient de la totalité des droits.

Pendant ce temps, la « Loi du Retour », loi discriminatoire israélienne, accorde automatiquement la citoyenneté aux Juifs d’où qu’ils viennent dans le monde, « alors qu’Israël refuse la citoyenneté même à ces Palestiniens dont l’histoire de leur résidence dans le pays est bien documentée ».

Feinte démocratie

Le rapport argumente : « Comme dans toute démocratie raciale, une telle majorité permet de revêtir les atours de la démocratie – élections démocratiques, corps législatif puissant – sans crainte pour le groupe racial dominant de perdre son hégémonie. »

Dans une illustration criante de la logique raciale embrassée par la direction d’Israël, le ministre de la Défense du pays, Avigdor Lieberman, a rappelé cette semaine la perspective selon laquelle l’État juif devrait finalement être ethniquement nettoyé pratiquement de tous les Palestiniens.

« Il n’y a aucune raison pour que Sheikh Raed Salah, Ayman Odeh, Basel Ghattas ou Haneen Zoabi restent des citoyens israéliens », a-t-il dit, faisant référence aux personnalités politiques palestiniennes, dont trois sont membres du parlement israélien, la Knesset.

Israël interdit à quiconque d’utiliser son système ostensiblement démocratique pour mettre en question l’organisation fondamentalement raciste du régime. Sa Loi Fondamentale – ce qui se rapproche le plus d’une constitution écrite en Israël – interdit aux partis de fonctionner sur un programme qui comporterait, explicitement ou implicitement, « la négation de l’existence de l’État d’Israël en tant qu’Etat juif et démocratique ».

« Le droit de vote perd sa signification en terme d’égalité des droits lorsqu’un groupe racial est juridiquement empêché de dénoncer les lois qui perpétuent l’inégalité », déclare le rapport. « La législation israélienne interdit une opposition palestinienne organisée à la domination juive, la rendant illégale et même séditieuse. »

Ce n’est pas la première analyse qui trouve que la politique israélienne est conforme à la définition juridique de l’apartheid : une étude de 2009 du Conseil de Recherches en Sciences Humaines d’Afrique du Sud disait en conclusion qu’Israël pratiquait l’apartheid en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza.

Mais la nouvelle étude de l’ONU va beaucoup plus loin, trouvant que le système d’apartheid d’Israël domine la totalité du peuple palestinien. Elle conclut en disant que la « fragmentation stratégique » du peuple palestinien en unités territoriales et en régimes juridiques séparés – en tant que citoyens avec des droits limités à l’intérieur d’Israël, en tant qu’apatrides en Cisjordanie et à Gaza, en tant que « résidents permanents » à Jérusalem Est, ou en tant que réfugiés et exilés sans droit au retour – « est la principale méthode par laquelle Israël impose un régime d’apartheid ».

L’étude de 2009 a été supervisée par la politologue Virginia Tilley. Tilley et l’éminent professeur de droit international Richard Falk sont les coauteurs de ce nouveau rapport de l’ONU.

Mettre fin à une « entreprise criminelle »

Les gouvernements ont une obligation juridique d’agir immédiatement pour mettre fin au crime d’apartheid. Ceci signifie également refuser de reconnaître un régime d’apartheid comme légal, refuser d’aider un Etat à maintenir ce type de régime et coopérer avec les organes de l’ONU et des autres Etats pour y mettre fin.

Le rapport exhorte les organes de l’ONU à agir et suggère même d’obtenir une avis officiel de la Haute Cour de Justice sur le système d’apartheid d’Israël. Les gouvernements nationaux devraient aussi soutenir BDS et permettre « des procédures pénales contre les responsables israéliens objectivement liés aux pratiques d’apartheid ».
Mais, étant donné que les Etats et les organismes officiels ne semblent pas près d’en prendre le chemin, le rapport reconnaît que « les institutions de la société civile et les individus ont un devoir moral d’utiliser les instruments dont ils disposent pour éveiller l’attention sur cette entreprise criminelle qui perdure ».

Ils doivent se servir de ces outils pour « exercer une pression sur Israël pour démanteler les structures de l’apartheid et négocier de bonne foi une paix durable qui reconnaisse les droits des Palestiniens selon le droit international et rende possible pour les peuples de vivre ensemble sur la base d’une égalité réelle ».

Mouvement transnational

Rappelant une période antérieure, le rapport remarque que la recherche et les analyses juridiques faites par les organes de l’ONU – tels que le Centre des Nations Unies Contre l’Apartheid – ont été des ressources essentielles pour les militants de la société civile dans leurs efforts visant à « légitimer le boycott,le désinvestissement et les sanctions et à contribuer à la formation générale d’un mouvement transnational contre l’apartheid en Afrique du Sud.

L’une des clefs du rapport vise aujourd’hui à encourager « des mesures pratiques en accord avec le droit international pour exercer une pression sur Israël pour démanteler son régime d’apartheid ».

« Il faudrait faire des efforts pour élargir le soutien aux initiatives de boycott, désinvestissement et sanctions auprès des acteurs de la société civile », recommande le rapport.

Il faudrait « rappeler » aux sociétés du secteur privé « la responsabilité juridique, morale et politique qu’elles ont de mettre fin aux entreprises et projets commerciaux qui aident et encouragent, directement ou indirectement, le régime d’apartheid ».

Tout ceci confirme le raisonnement et les tactiques du mouvement BDS conduit parles Palestiniens – pour le soutien duquel, même l’Union Européenne résolument pro-israélienne a tardivement reconnu que c’était un droit démocratique.

pour The Electronic Intifada |Traduction J.Ch. pour l’AURDIP |Rapports

 

 

Vous aimerez aussi...

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *