Des cinéastes israéliens demandent à Locarno de retirer un film en raison d’inquiétudes au sujet des conditions « racistes et explicitement politiques » attachées au financement de ce film (Exclusif)

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‘My Neighbor Adolf’ [‘Mon voisin Adolphe’] devait être présenté en première mondiale au festival. ‘My Neighbor Adolf’ @2-TEAM PRODUCTIONS-LUIS-CANO

 

Par Alex Ritman

le 2 août 2022

 

Un groupe de cinéastes et artistes israéliens exhorte le Festival du Film de Locarno à abandonner la projection en première mondiale du long métrage israélien Mon Voisin Adolf en raison d’inquiétudes sur ce que le groupe appelle les conditions « racistes » et « explicitement politiques » attachées à son financement, a appris The Hoolywood Reporter (THR).

La tragi-comédie du réalisateur israélien d’origine russe Léon Prudovsky (Five Hours From Paris) [A Cinq Heures de Paris] est actuellement programmée pour le jeudi 4 août à Locarno, deuxième jour du festival, mais le groupe, dans lequel se trouve le réalisateur Guy Davidi sélectionné aux Oscars (Cinq Caméras brisées, Innocence prévu pour le prochain Venise), a signé une lettre appelant à retirer cet événement à cause du soutien apporté au film par le Projet du Cinéma Israélien de la Fondation Rabinovich, le plus gros financeur de cinéma.

Ce changement arrive le lendemain du jour où PACBI, branche culturelle du mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions, démarche conduite par les Palestiniens et qui se déclare inspirée par les tactiques de boycott qui ont aidé à faire tomber l’Apartheid en Afrique du Sud, ait appelé « toutes les institutions cinématographiques, dont les festivals internationaux, les cinémas et les distributeurs, à boycotter les films financés à partir de 2022 par la Fondation Yeoshua Rabinovich pour le Projet du cinéma Israélien des Arts ».

PACBI affirme que la Fondation Rabinovich oblige maintenant par contrat les producteurs à accepter que leurs films ne comportent aucune déclaration ou message qui nie l’« existence de l’État d’Israël en tant qu’État juif et démocratique », chose dont il dit qu’elle est contraire au rapport des organisations de défense des droits de l’homme, dont Amnesty International, Human Rights Watch et B’Tselem, qui toutes ont décrit Israël comme déployant un système d’« Apartheid » contre les Palestiniens.

PACBI déclare par ailleurs que les films qui sollicitent le financement de la Fondation ne doivent pas commémorer le Jour de l’Indépendance Israélienne ou le jour de la création de l’État (jour également connu comme la « Nakba », qui signifie « catastrophe » en arabe) comme un « jour de deuil », décrivant les conditions de financement comme « mettant Israël à l’abri du contrôle et de la responsabilisation internationales » et obligeant les cinéastes à « nier la réalité ».

Dans la lettre, vue par THR, le groupe de cinéastes et artistes israéliens – qui, à côté de Davidi, comprend Dror Dayan (documentariste), Avi Hershkovitz (réalisateur), Liad Hussein Kantorowicz (artiste, musicien), Jonathan Ofir (chef d’orchestre, violoniste), Michal Sapir (musicien, écrivain) et Eyal Sivan (réalisateur) – dit que la Fondation a attaché « des ficelles racistes et explicitement politiques » à son financement.

« Israël est un État d’apartheid, comme les Palestiniens, les Sud Africains et des juristes l’ont défini depuis longtemps, et comme Amnesty International et Human Rights Watch l’ont confirmé ces dernières années dans des rapports détaillés. Loin d’être une démocratie, Israël est ‘un régime de suprématie juive du Jourdain à la Méditerranée’, comme l’a dit la principale association israélienne de défense des droits de l’homme B’Tselem, a écrit le groupe.

« Ce régime d’oppression a été installé grâce au déplacement violent et à la dépossession de la plus grande partie de la population palestinienne autochtone. Que l’État d’Israël, ses institutions complices et ses puissants lobbies veuillent que, en tant que Juifs israéliens, nous gardions le silence sur ce nettoyage ethnique systématique n’est pas surprenant. Mais que des raconteurs d’histoire acceptent des conditions aussi soumises à la censure et immorales pour leurs projets de films est une indéniable forme de complicité avec cette incessante Nakba à laquelle font face les Palestiniens.

Quand THR l’a approchée, la Fondation Rabinovich a affirmé que les extraits de son contrat cités par PACBI n’étaient pas nouveaux, et avaient été ajoutés, non par la Fondation elle même, mais par la loi israélienne adoptée en 2011.

« Cette loi israélienne contraint toutes les institutions financées par l’État d’Israël (fonds cinématographiques, théâtres, troupes de danse, etc.), a-t-il déclaré. « Comme tous les fonds cinématographiques israéliens, la Fondation Rabinovich est financée par le ministère israélien de la Culture et des Sports et, comme tous les fonds cinématographiques israéliens, la fondation est contrainte par cette loi. »

Au centre du litige, Mon Voisin Adolf a pour vedette David Hayman (Le Garçon en Pyjama Rayé, Sid et Nancy) qui incarne un survivant de l’Holocauste qui vit en Colombie en 1960, dans la période qui a juste fait suite à la capture du criminel Adolf Eichmann par les agents du Mossad en Argentine. Quand un mystérieux vieil homme allemand (Udo Kier) emménage à la porte d’à côté, il commence à soupçonner que son nouveau voisin est Adolf Hitler. Mais pour en avoir la preuve, il devra d’abord devenir proche de l’homme, si proche qu’il y a un danger que les deux deviennent amis. Au début de cette année, le Cohen Media Group a acquis les droits américains pour ce film.

The Hollywood Reporter a pris contact avec le Festival du Film de Locarno.

Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine et Campagne BDS France Montpellier

Source : The Hollywood Reporter

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