Le tribunal militaire d’Ofer condamne la DDH Khitam Sa’afin à 16 mois de prison, suite à des accusations exagérées du Procureur militaire

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(photo de Khitam Sa’afin)

23 février 2022

Addameer

 

La détention arbitraire de longue durée de Khitam Sa’afin met en exergue les efforts persistants des autorités d’occupation israéliennes pour l’incarcérer dans le but de tenter d’obliger à un témoignage ou à une négociation forcée afin de criminaliser plus largement les organisations de la société civile palestinienne (OSC). C’est rendu particulièrement évident par sa détention administrative préalable fondée sur des « documents secrets », puis des accusations exagérées portées contre elle.

Khitam Sa’afin a d’abord été arrêtée et détenue pendant huit mois sous détention administrative, sans charges ni procès. En amont du début de son troisième ordre de détention administrative, le procureur militaire israélien a présenté un acte d’accusation contre Khitam le 8juin 2021, annulant ainsi l’ordre de détention et la transférant en incarcération préalable au procès, selon une longue série d’accusations exagérées d’actes et d’activités bien au-delà de tout acte singulier, spécifique réalisé par Khitam. Cette pratique est largement utilisée par le Procureur militaire pour allonger la détention et les procédures judiciaires en tant que mesure punitive et coercitive contre le détenu.

Pendant le procès, le procureur militaire israélien a porté des accusations contre Khita, prétendant qu’elle était responsable d’ « administration conjointe » avec les six OSC palestiniennes très récemment déclarées illégales et arbitrairement traitées d’ « organisations terroristes » par le régime israélien d’occupation, au milieu d’une condamnation massive des organes de l’ONU, des institutions internationales des droits de l’homme, et des États parties. Le procureur militaire a par ailleurs prétendu qu’elle aidait au « blanchiment d’argent » entre les organisations et le Front Populaire de Libération de la Palestine ( FPLP). De façon très frappante, cette démarche non seulement illustre l’habitude d’appliquer rétroactivement les ordres militaires israéliens pour porter des accusations contre les défenseurs des droits de l’homme et les militants étudiants, mais elle évoque dangereusement les conséquences imminentes, et maintenant explicites, de la récente criminalisation des six organisations palestiniennes, dont toutes sont engagées dans un travail essentiel de défense des droits de l’homme et de services dans le territoire palestinien occupé (TPO).

L’avocat Mahmoud Hassan, conseiller juridique représentant Khitam, a soumis plusieurs requêtes au tribunal militaire pour qu’il dévoile les « documents secrets » contre Khitam, en plus de la libération de Khitam jusqu’à la fin des procédures judiciaires. Toutefois, le tribunal militaire a intentionnellement retardé l’étude de ces requêtes, obligeant l’avocat Hassan à entrer directement en communication avec le procureur militaire. Ceci a fait que les parties sont arrivées à un accord pour amender la liste finale d’accusations et la limiter à l’adhésion de Khitam à une organisation condamnée comme « illégale » selon les ordres militaires israéliens, faisant référence au FPLP, sa participation aux activités sociales et publiques en relation avec l’organisation mentionnée ci-dessus, et sa position de présidente de l’Union des Comités de Femmes Palestiniennes avant l’ordre militaire déclarant illégale l’UCFP.

La criminalisation du simple fait d’être membre ou de s’affilier à un parti politique viole les conventions fondamentales internationales qui garantissent que ces activités sont protégées en tant que libertés de pensée et d’association. Elle permet également aux autorités militaires israéliennes de détenir des individus sans prouver – ni même prétendre – aucune réelle culpabilité individuelle dans des activités ou de la résistance contre l’occupation armée continue israélienne qui pourraient être considérées comme des infractions légitimes. Ce genre d’attaques et de harcèlement fait partie de la volonté de l’occupation israélienne de réduire au silence ceux qui se défendent et expriment leur opposition à l’apartheid israélien et à sa politique illégale, au premier desquels les défenseurs palestiniens des droits de l’homme.

De nombreux détenus palestiniens plaident coupables pour des infractions qu’ils n’ont pas commises et renoncent à leur droit de poursuivre les procédures judiciaires, y compris l’audition des témoins et l’examen des preuves. Divers facteurs conduisent les Palestiniens à rechercher une négociation de plaidoyer : dont le manque de foi et de confiance dans la capacité des tribunaux militaires israéliens à assurer un procès équitable et une condamnation juste, à éviter les procédures judiciaires manifestement injustes et prolongées des tribunaux militaires (parfois, atteindre la fin des procédures judiciaires est plus long que la condamnation à la détention d’une négociation de plaidoyer), et à éviter les trajets répétés et pénibles depuis la prison située en Israël jusqu’aux audiences au tribunal situé en Cisjordanie.

Khitam a été la Présidente de l’Union des Comités de Femmes Palestiniennes (UCFP) depuis 2010, membre du secrétariat de l’Union Générale des Femmes Palestiniennes, et une éminente défenseure des droits fondamentaux des Palestiniens. Son travail est bien reconnu aux niveaux régional et international. Elle est engagée dans le Forum Social Mondial et dans la Coalition régionale des Défenseurs des Droits Fondamentaux des Femmes au Moyen Orient et en Afrique du Nord. Elle a porté la voix des femmes palestiniennes défavorisées concernant les questions sociales et elle croit que la liberté des femmes est parallèle à la liberté du peuple palestinien. Elle est mère de trois enfants et grand-mère.

Traduction : J. Ch. pour l’AURDIP et Campagne BDS France Montpellier

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